Quand on visite les grottes de Meschers, on s’attend souvent à un «panaché» de Padirac et de Lascaux. En fait c’est le nom d’ «habitations troglodytiques» qui se prêterait plus à ces grottes à l’histoire si complexe. A l’origine, les « trous de Meschers », comme on les appelait autrefois, étaient de sinistres excavations creusées dans la falaise calcaire par les intempéries et l’action du sel ; puis les hommes ont agrandi ces « trous » au fil des ans et des besoins. On commence à trouver des traces d’habitations du site au Néolithique. Il ne cessera d’être occupé dès lors, plutôt par une population pauvre n’ayant pas les moyens de s’offrir un logis en surface.
Dans un premier temps, les grottes fonctionnent comme une sorte de faubourg de Meschers. Faux sauniers et protestants y ont trouvé un refuge idéal, les uns pour cacher leurs trafics, les autres leur foi, les pauvres pour y trouver un logis confortable pour l’époque. La température est à peu près celle d’une cave à vin, elle oscille entre 8 et 14 °C au long de l’année. Parfois, telle ou telle grotte disposait de l’eau courante sous forme d’une « ruisselle » qui jaillit d’une fissure de la roche. On trouve çà et là les vestiges d’une sorte de coursive dans une strate calcaire un peu plus dure, une vraie promenade souvent décrite par les voyageurs du XIXe siècle. Elle permettait autrefois une communication côté mer entre les diverses habitations de la falaise. Deux des grottes, celles du Régulus et des Fontaines et celles de Matata, sont ouvertes au public. Outre des évocations de la vie d’autrefois, on découvre un panorama unique sur l’estuaire.
Les grottes troglodytiques
2430 hectares, c’est une grande superficie pour une commune rurale. Cette surface implique un réseau de chemins importants et c’est de lui dont nous vous parlons ici. D’abord, ce réseau croise ou suit un itinéraire roman tel qu’il est défini dans le Cartulaire de Vaux. Il en fut de même avec le chemin des Templiers qui joignait la Commanderie des Epeaux de Meursac à la Grande Templière qui se trouvait à Beloire (commune de Meschers). Deux itinéraires religieux ont donc traversé la commune au sud du bourg. Mais le Nord a aussi connu d’autres itinéraires non moins spirituels. Lorsqu’on arrive à Chenaumoine, ce lieu-dit abrite le tombeau des Jarousseau, famille du célèbre « pasteur du désert ».
A l’époque des persécutions protestantes, sous Louis XV, Jean Jarousseau, pasteur audacieux, continuait en dépit des interdictions et persécutions à célébrer un culte clandestin en plein marais de Chenaumoine où les fidèles affluaient de partout en barque, car les canaux du marais étaient navigables depuis Meschers et St Georges de Didonne. Le Musée Agricole, sur le site du Château de Didonne, invite à la découverte de l’évolution du machinisme rural et des traditions de nos campagnes depuis le XVIIIe siècle. Une collection de tracteurs, unique dans la région, y est présentée.
Batteuse (Musée Agricole du Château de Didonne)
La commune du Chay possède l’une des plus belles églises néo-classiques du Pays Royannais qui présente entre autres particularités, un baptistère en saillie à la façon des églises romanes des débuts, des boiseries d’une rare qualité, des bancs en rapport avec celles-ci. Sa forme de nef unique, tréflée, à l’allure peu allongée se terminant en abside semi-circulaire est typique d’une certaine catégorie d’ouvrages datant de la même période de construction (fin XVIIIe, début XIXe siècle). Dans un registre plus économique, la commune du Chay possède une autre particularité, elle est traversée par un fleuve.
Certes au niveau communal, il ne fait que 2,50 m mais au sens géographique du terme il s’agit du plus petit fleuve de France : la Seudre, et en trois points de la commune les hommes ont su la domestiquer. Ils y ont installé 3 moulins à eau : un à l’Auberge du Moulin et les deux autres, plus puissants, à Riolet et à Morgard. Ces deux derniers moulins à eau, datant du XIXe siècle, ont même évolué jusqu’au stade ultime : la minoterie. Il y a donc eu dans cette petite localité deux usines évoluant sensiblement de la même façon : même étape de conversion de moulin en minoterie, même puissance d’écrasement, mêmes époques de modifications successives. Malheureusement, à l’heure actuelle, le premier est à l’abandon quant au deuxième, il abrite désormais des appartements.
Nota : La meunerie est la façon d’obtenir de la farine à partir des céréales en les broyant à l’aide de meules en pierre (extraction lente), meilleure qualité. La minoterie est la façon d’obtenir de la farine à partir des céréales en les broyant entre des cylindres tournant à grande vitesse (extraction rapide), qualité moindre.
Saint-Symphorien de Grézac est une église d’une rare originalité, où tous les styles, toutes les modifications qui se sont succédées entre le XIIe et le XIXe siècle s’imbriquent les uns dans les autres, sans forcément s’ajuster, mais en offrant un ensemble élégant et cohérent, atypique pour la région. Ce sont principalement les sculptures, exceptionnelles, qui attirent l’œil. A elle seule, la façade est un livre ouvert. Sur la gauche, appuyée sur un contrefort, on trouve une représentation de la fable d’Esope « le renard et la cigogne », étonnante de précision et de vérité. Lui fait face un centaure malheureusement décapité. Au centre, se trouve une représentation, meurtrie par l’érosion, du martyr de Saint Symphorien, patron de l’église.
Détail de la façade
A l’intérieur, à gauche de l’entrée, une pierre tombale datée du XVe siècle, représente le Seigneur de Longchamp en armure, accompagné dans l’au-delà par son lévrier. Ils côtoient tous deux un imposant baptême du Christ par Saint-Jean Baptiste, en stuc blanc du XIXe siècle. Mais la pièce maîtresse se découvre sous le chœur : une magnifique crypte ossuaire, du XIIe siècle, accessible par un escalier, dévoile quatre petites voûtes de toute beauté. Elles sont soutenues par un chapiteau central très expressif, dit « le chapiteau des morts ».
Église Saint Martin, le retable, Arces sur Gironde
Il ne faut pas manquer le puits à margelle gallo-romaine de Puyveil (en français ancien, le vieux puits). D’après le comte de Cassini (vers 1703-1708), ce lieu-dit existait déjà sous le nom de Poivels. Il est probable que le nom de Puyveil soit apparu, non en raison de l’ancienneté de la margelle (XVIIIe ou XIXe siècle), mais en raison de l’ancienneté du puisage. Nous aurions donc affaire à un puits de résurgence naturelle. Les notes de Masse, qui sont postérieures à Cassini, mentionnent de nombreuses ruines visibles au Fâ, lieu d’origine quasi certain de la margelle. Sur les communes proches du territoire du site archéologique de Barzan, les exemples de ré-emplois de ce genre sont nombreux. Ici, toutes les maisons ou presque ont conservé le cachet de leur époque de construction ; des maisons de « notables » du XVIIIème siècle pour être plus précis. Parmi ces demeures, l’une d’entre-elles sort cependant du lot, c’est le presbytère, aujourd’hui propriété privée.
Sa grâce, son ampleur traduisent à merveille son origine. Cet édifice, en fait un logis abbatial réservé à l’abbé de Vaux lorsqu’il venait séjourner en son fief d’Arces, est probablement le plus beau presbytère du Pays Royannais avec celui d’Epargnes. L’église, datant du XIème siècle, fait partie des joyaux du patrimoine architectural du Pays Royannais, avec son retable d’une grande finesse.
Du carrefour de l’Eglise à la rue de l’Hôtel de Ville s’étire une longue artère qui est la rue principale du lieu. Loin d’être une rue ordinaire, cette rue « parle » d’elle-même pour qui est un peu observateur. En premier lieu en haut, c’est à dire côté église, depuis les marches de l’épicerie, on peut observer une date au-dessus du « café rouge » qui, en dépit de toutes les appellations que pourront lui donner ses propriétaires successifs, restera dans l’esprit des gens du coin le « café rouge ».
Au-dessus d’un linteau, en hauteur côté rue du Calvaire, on lit la date 1740 puis, si l’on jette un coup d’œil de l’autre côté de la rue un peu plus haut, un étrange lutin penché sur un cadran solaire vous toise de toutes ses hauteurs, cherchant à dominer l’église du regard : c’est le Bonhomme-Cozes que finalement peu de Cozillons connaissent. Descendant cette rue, à droite depuis le parking de la perception, on a une vue de la façade du presbytère.
Continuons la descente, un bref coup d’œil aux deux ruelles qui coupent notre rue s’impose, car leur étroitesse et la présence de chasses-roues au pied des coins de murs à l’intersection avec notre axe attestent d’une certaine ancienneté. On arrive aux Halles, longtemps dites du XIIe siècle, mais plus sûrement du XVe même si les éléments de charpente eux sont du XVIIe voire du XVIIIe siècle. Ces halles sont probablement uniques en Saintonge. Elles ont gardé l’ensemble de leur mobilier d’origine, car les municipalités successives ont pris conscience de la valeur inestimable de ce monument récemment restauré.
Le Bonhomme-Cozes
On remarquera la tendance des maisons qui l’entourent : sur de nombreuses façades et linteaux, on peut lire des dates et des signes et se rendre compte que ces maisons du tour des halles étaient des maisons de « riches ». Cela se voit à la taille et au nombre de fenêtres, car autrefois, une fenêtre était source de lumière mais aussi une perte de chaleur.
Ainsi, à la taille des fenêtres et à leur nombre, on pouvait quasiment déduire la fortune des propriétaires initiaux des maisons, qui étaient d’ailleurs imposés en conséquence. L’imposant clocher octogonal de l’église Saint-Pierre, construit au XVe siècle, domine le bourg. A l’extérieur, on y retrouve une sculpture, tirée de la fable du Renard et de la Cigogne, similaire à celle de la façade de l’église de Grézac.
Le presbytère, qui date du XVIIe siècle, est un pavillon de plain pied flanqué de deux retours de maçonnerie en trompe l’œil, donnant ainsi l’illusion d’une plus grande profondeur. Les façades sur cour et jardin affichent la même harmonie dans sa simplicité. C’est un ancien prieuré – cure qui appartenait autrefois au prieuré augustin Saint-Etienne de Mortagne-sur-Gironde. Un prieuré - cure n’est pas un monastère mais un édifice où deux types de clercs pouvaient cohabiter : bénéficiaire et desservant. Le bénéficiaire était le titulaire de la paroisse et également le fermier. C’est lui qui rendait des comptes à l’Eglise. Il n’était d’ailleurs pas toujours membre du clergé, mais pouvait en porter un titre : abbé, prieur… Le desservant était un membre du bas clergé payé par le titulaire pour dire les offices à sa place et parfois pour effectuer quelques menues tâches administratives ou de gestion et collecter des taxes pour le titulaire et pour l’ordre auquel appartenait le prieuré. On appelait ce système la commende. Il a été aboli peu avant la Révolution mais il en a été l’une des causes. L’édifice eut donc deux « vies », celle de prieuré-cure puis celle de simple presbytère. Le premier curé dont on trouve le nom, après recherches, est l’abbé Repéré.
Ce dernier était chanoine au collège du prieuré de Mortagne, puis fût nommé résident à Epargnes (c’est-à-dire titulaire) en 1717. Il avait également la charge des paroisses de Chenac et Saint Seurin d’Uzet. Restauré en 1992, le presbytère abrite aujourd’hui un restaurant gastronomique. Un intéressant puits à toit d’ardoise orne élégamment le jardin. La présence d’une très vieille glycine en façade et de quelques arbres et arbustes brise l’ensemble avec grâce.
Bien peu de gens connaissent l’originalité de l’église du village; c’est pourtant là, la seule église gothique d’époque du Pays Royannais (elle date du XIIIe siècle). Il est vrai que son allure massive et certains archaïsmes de la construction pourraient faire penser à une église de styles juxtaposés sur une base romane. Mais quand on est à l’intérieur et que l’on regarde d’un peu plus près les baies et décors, le doute n’est plus permis. Le plan rectangulaire de l’édifice correspond à une typologie gothique très présente en Saintonge.
On doit toutefois noter que les deux premières travées ont été rebâties en 1879, un monogramme en fait foi sur les clés de voûtes. D’autres adjonctions modernes ont été faites à cette époque telles que la chaire, l’autel et la sacristie néogothique. On remarque également une reprise du haut de la façade et de l’oculus.Quand on parle aux gens d’ici de petit patrimoine, le lavoir est souvent le premier exemple auquel ils pensent. Dans les villages, c’est avec l’église et la mairie, l’élément le plus central du village. A Boutenac, il n’en est rien car le lavoir est à l’écart. Il est bâti près d’un pissot, c’est-à-dire une source suintant du rocher (en saintongeais).
Calvaire sculpté par Arnold (XIXème siècle), Espagne
La tradition orale explique que cette source serait à l’origine de l’implantation et du nom du village qui s’est bâti sur la hauteur voisine, du fait des « boutenac » (endroit où l’eau boute -jaillit en vieux français-). Il est vrai que dans les environs de Boutenac il y a de nombreux puits et sources ; dès qu’il pleut, l’eau jaillit de toute part, remplit les « courrèges » des vignes, et occasionne des « fleuves » au moindre enfoncement de terrain. Le lavoir est constitué de timbres abrités sous un balet (un hangar) où les femmes venaient laver le linge dans la journée. Le lavoir, comme c’était souvent le cas, se transformait le soir en abreuvoir, endroit de rencontres plus masculines. C’était pour tous l’occasion d’échanger des nouvelles, de discuter du travail, de parler des méthodes de labour, de préparer des ventes de terrain...
Quand on traverse le village par la route de Bordeaux, on ne voit qu’à peine vingt pour cent de sa richesse. En effet, si l’on entre dans Brie, près de l’église de la toute fin du XVIIIe siècle (1799), on s’aperçoit que l’on est dans un pays de pierre, car presque toutes les façades des maisons riches ou pauvres en sont revêtues. Pas de la pierre de bord de Charente, venant de Crazannes, Port d’Envaux ou Thénac, mais de la pierre locale, une belle pierre calcaire blanche noyautée de silex gris-blanc ou bleuté selon qu’elle vient des carrières toutes proches de Touvent ou de Féole (sur la commune de Floirac).
Une pierre méprisée par certains tailleurs car elle est très dure et fait « virer » le ciseau, quand elle ne se casse pas si le taillant de l’outil tombe sur un noyau de silex dur comme l’acier !!! Cette pierre a fière allure sur ces maisons du centre de Brie, brillant de mille feux quand le soleil l’éclaire : à ce moment les îlots de silex révèlent leurs quartz tels des joyaux cachés quand la pierre est sciée. Le deuxième aspect caché de Brie est sa campagne discrète : quand on sort du quartier de l’église par le côté opposé à la route de Royan, on découvre le paysage complètement inattendu de la vallée céréalière de Brie et Floirac.
Mobilier de l'église, Brie sous Mortagne
Il y subsiste encore quelques tours de moulins, soulignant si nécessaire la vocation céréalière passée de la localité. On se plait alors à imaginer tous ces moulins, ailes déployées, symboles d’une activité dominante en Saintonge avant la viticulture. Au XIXe siècle la Saintonge était un grenier pour le Sud-Ouest de la France. Au moment où le Bordelais s’est recouvert de vignes en oubliant la nécessité vivrière des emblavures qui y existaient, sans la Saintonge et ses grains de farines, Bordeaux serait mort de faim, la famine menaçant en Bas Médoc.
Pourquoi l’église de Floirac se cache t-elle au fond d’une vallée ? Si vous allez dans cette commune, il vous faudra d’abord « mériter » l’église car celle-ci, une belle église romane du XIIe siècle entourée de son pittoresque cimetière ancien -l’un des plus remarquables de la région avec ses pierres tombales en cénotaphes- est placée non sur le haut de la colline à la manière de tous les édifices similaires, mais au fond d’un vallon où court un mince filet d’eau. Deux choses peuvent expliquer cet état de fait : premièrement cette église était au début une simple église prieurale, deuxièmement on a trouvé de nombreux tessons de briques gallo-romaines aux abords de l’édifice, indiquant que les anciens l’auraient probablement construite sur l’emplacement d’une villa gallo-romaine, chose tout à fait possible quand on sait que la plupart des ouvrages de toponymie attribue l’origine du lieu à la villa d’un praticien romain nommé Florus. Elle est par ailleurs le seul reste connu du Prieuré St Etienne de Floirac qui était uni au châpitre de Luçon en Vendée.
L'église et le cimetière ancien, Floirac
A St Romain sur Gironde, qui a troqué la fin de son nom, autrefois « de Beaumont » pour celui plus commun de « sur Gironde », le regard se pose d’abord sur l’église romane, selon certains, pré-romane selon d’autres. Cette très vieille église a perdu la moitié de sa nef lors des guerres de religion ou peut-être même pendant la Guerre de Cent Ans, nul ne peut actuellement le dire avec certitude. Comme pour accentuer cet effet « ancien », on s’aperçoit qu’il y a deux sarcophages appuyés sur le mur est et que la base de la tour du clocher est constituée de morceaux d’autres sarcophages. La structure du village est dans l’ensemble très ancienne et a adopté un plan disparate. La majeure partie des maisons date des XVIIe et XVIIIe siècles : on trouve parfois les huisseries et les menuiseries de l’époque. Ainsi une maison près de l’église comporte-t-elle encore une fenêtre à canevas dont on peut distinguer la structure complète.
L'église, Saint-Romain-sur-Gironde
Quelques autres archaïsmes tout aussi intéressants subsistent dans cette localité,tel le puits commun engoncé dans le mur d’une maison et accessible de celle-ci par une fenêtre creusée à cet effet, signe du partage du droit de puisage entre les habitants de la maison et la communauté. Le quéreu réduit à sa plus simple expression en somme. Derrière l’église, l’ensemble école-mairie (1904) est un bel exemple d’architecture publique rurale du début du siècle. La légende vient couronner le tout car elle dit que Charlemagne et ses compagnons ont traversé le village à leur retour d’Espagne.
Ainsi, la rue principale du lieu s’appelle-t-elle rue Charlemagne (fait unique en Pays Royannais !!!). Sur les hauteurs du village, la légende court que la mère de Pantagruel, en laissant tomber des cailloux de son tablier, aurait contribué à créer le site de la Tour de Beaumont, où se dresse actuellement un amer pour les bateaux...
Ancienne cimenterie, Mortagne-sur-Gironde
Pour le touriste de passage, Mortagne n’est pas un port de plaisance comme les autres. Si on laisse aller son regard sur le port de la Rive (c’est son nom), on remarquera sans difficulté que ce petit havre de loisirs cache un ancien port de commerce dont presque tous les bâtiments types subsistent.
Ainsi peut-on compter deux minoteries dont l’une est encore en semi-activité (elle sert de magasin à farine).
Les diverses constructions permettant d’identifier un port de commerce sont également en place : ce sont la maison de l’éclusier, celle des douaniers, bien que transformées en guinguette ou en maisons d’habitation gardent le profil des bâtiments administratifs «de grande série» avec leur toit pointu.
Ces bâtiments ne sont pas dans le ton des autres constructions, car précisément ce sont des modèles types censés s’adapter du Nord au Sud de la France. On en trouve même dans les anciennes colonies, en Afrique ou en Asie. Mais revenons à La Rive.
Quand vers 1850 se décide la construction d’un bassin à flot, on a grand espoir de voir le port devenir ce que la Pallice ou le Havre sont aujourd’hui ! En effet, il recelait deux minoteries, des négociants, un chantier naval, un poste de douane et un petit régiment de gendarmerie. La marine nationale était également présente et le chemin de fer y exista à partir de 1891. Une cimenterie construite un peu à l’écart du port assurait des débouchés futurs. Mais même si en 1939 le port de Mortagne atteint le rang très honorable de troisième port de l’estuaire de la Gironde après Bordeaux et Blaye, la deuxième guerre mit fin à l’aventure. La priorité étant la reconstruction économique de la région et du pays tout entier, le port de la Rive demeura seulement une petite partie de ce chantier. Le long de la route qui mène à Saint-Romain-sur-Gironde, on peut visiter un ermitage monolithique, fondé par Saint Martial au IIe siècle de notre ère, avec sa chapelle et ses différentes salles creusées sous 30 mètres de falaises.
Chenac – St Seurin d’Uzet : c’est un nom un peu long, mais tout s’explique quand on sait qu’il s’agit, à l’origine, de deux communes distinctes qui en 1965 ont décidé de fusionner. Deux communes, deux territoires, avec deux identités distinctes, bien marquées : Chenac tournée vers la terre et St-Seurin vers l’estuaire de la Gironde...
L’identité la plus marquée est tout de même celle de St-Seurin d’Uzet qui s’est déplacée au XVIIIe siècle d’une colline stérile à un estuaire riche en fructueux échanges : du trafic gabarier en naissance, aux pêches que l’on allait connaître miraculeuses. Aujourd’hui, on peut lire ces transformations dans les pierres des édifices du bourg :
La mairie, Saint-Seurin-d'Uzet
Depuis l’église en passant par l’usine (minoterie autrefois simple moulin) idéalement positionnée sur le port, la mairie reflet d’une richesse passée (c’est une mairie-école d’architecte datant des années fastes des pêches miraculeuses, esturgeons en tête). Mais des pierres plus modestes sont aussi les témoins de cette époque, comme celles de l’abreuvoir du Juliat non loin de l’endroit où les pêcheurs accrochaient leurs prises, se servant du ruisseau comme d’un réfrigérateur naturel. L’écho des voix des célébrités en villégiature à Royan dans les années 30 qui venaient déguster le caviar, l’or noir de la Gironde, ne résonnent plus dans les rues de St Seurin.
Mais les pierres ont le souvenir d’avoir entendu la gouaille de Jean Gabin ou la voix plus raffinée de Gaby Morlay. Quelques anciens ont encore l’image de leurs automobiles rutilantes arrivant dans un tintamarre de klaxons et de vrombissements étourdissants. Dans le chœur de l’église Saint-Séverin, proche du port, une vitrine abrite «Le Brick», bateau votif en bois peint, navire de commerce armé, datant de la première moitié du XIXe siècle.
Ex-voto, église de Bazan
Un port gallo-romain enfoui sous la terre… En 1715, Claude Masse, géographe de Louis XIV, évoque le site dit de la « Maison de la Garde » en ces termes : « Environ à 1 100 toises de Talmont, la tradition assure qu’il y avait jadis une ville fameuse…La première preuve visible est la base d’une tour de 13 à 14 toises de diamètre sur laquelle on a bâti un moulin que l’on appelle du FAR, que l’on croit avoir été un ancien fanal… ». L’ingénieur renommé fait ensuite état des monnaies et céramiques trouvées alentours, des matériaux, pans de mur, et fondations encore visibles. Les premières fouilles d’importance, effectuées dès 1923 autour du moulin font remonter à la surface des morceaux de décor du temple, d’une grande finesse, ainsi qu’une stèle. Ce n’est réellement qu’à partir de 1975 que le site gallo-romain du Fâ va se révéler dans toute son ampleur, grâce à l’archéologie aérienne et son promoteur Jacques Dassié :
On a pu ainsi relever que la ville portuaire de Novioregum (son nom latin) s’étendait sur 140 hectares. Le survol global du site, ainsi que la prospection au sol ont permis d’établir progressivement le plan de la structure urbaine, avec notamment les voies traversant l’agglomération (decumanus et cardo), les unités d’habitation (insulae), l’aqueduc, les thermes, le forum, le théâtre et les entrepôts (horrea)… Les fouilles se poursuivent sans arrêt, afin de permettre la mise à jour d’autres vestiges et trésors cachés (visites permanentes). A l’intérieur de l’église saint-Pierre, construite en 1878, on peut voir, accroché à la nef, un ex-voto récemment classé, donné à l’église par un ancien marin du Port des Monards.
Talmont sur Gironde, classé parmi les plus beaux villages de France, est probablement l’image la plus connue du Pays Royannais, avec son église bâtie « au péril des flots ». Dans celle-ci, une goélette militaire du milieu du XIXe siècle a été donnée en ex-voto par un marin de la cité après qu’il eut réchappé d’un naufrage en mer de chine et de sa capture par des pirates. Sur une colonne de l’abside, côté sud, existe un étrange graffiti dans la pierre calcaire, comme une orange découpée en quartiers souligné d’une date : 1586.
La petite histoire dit qu’en cette fin du XVIe siècle, les habitants se seraient révoltés contre une taxe ou une décision les contraignant ; ils auraient subi une des pires punitions qui se pouvait donner à l’époque : la privation de cloche. En effet, sans cloche, pas d’heure. Si cette punition n’a pas outre mesure indisposé les paysans ou bien les gens exerçant une profession de plein air, il n’en fut pas de même pour les corporations exerçant en boutique, lieu où la course du soleil est bien moins apparente. Les habitants auraient alors fait graver un cadran solaire sur le seul édifice public où ils avaient libre accès : l’église. Par la suite, les plus riches en ont installé sur leurs maisons. Ainsi, en trouve-t-on à l’intérieur de l’ancien presbytère, sur un mur qui fut autrefois une façade.
Fontaine de Lafond, Talmont-sur-Gironde
Deux subsistent avec leurs aiguilles bien réglées dans la rue du Port. Il y en a même certains ébauchés et non terminés, car ils étaient gravés à l’écart de l’exposition sud nécessaire à leur bon fonctionnement. Au centre d’une ville close dont le plan médiéval classique a été voulu par Edouard 1er d’Angleterre, Talmont recèle un certain nombre de quereux, comme on appelle les petites venelles se terminant en impasse.
Les puits y sont nombreux, mais il faut savoir que l’eau y est saumâtre. L’eau douce ne se trouve qu’en deux endroits : à Lafond et au Portail du Haut, dans le hameau du Caillaud proche du Bourg. Au lieu-dit Lafond, on trouve une très belle fontaine entourée de plusieurs timbres (bassins à laver creusés dans la pierre). Au passage on remarque un magnifique cadran solaire de style néo-classique daté de 1833. Au centre du Bourg, le tilleul de la place de la Priauté, que l’on dit avoir été planté en 1895, porte allègrement son âge canonique.